Remarque: Ce site n'est pas le site officiel du Carri
Pour
en savoir
plus vous pouvez lire ici l'intégralité
du chapitre consacré au Carri du livre de Camille Tiran "Chronique de Mazan" publié chez SCRIBA.
Il y a lieu également d'envisager le
problème sous un
autre aspect : de janvier à juin, la terre ne produit aucun bien
de
consommation et l'homme doit vivre sur ses récoltes de l'automne
précédent. Quand les récoltes ont
été déficientes, quand elles ont subi
des détériorations du fait du gel, de
l'humidité, des
déprédateurs ou des pillages , c'est la disette et
quelquefois la
famine - alors la hargne sévit plus spécialement en cette
période
printanière.
Dans un but d'apaisement, pour oublier privation et carême, les
hommes
se défoulent lors des fêtes carnavalesques. On brûle
sa majesté
Caramentran. Ces manifestations d'origine païenne très
anciennes ont
été remises à l'honneur d'une part par les
Italiens qui lancent la mode
des mascarades publiques et par le Régent de France qui organise
en
1715 des bals masqués où règne l'esprit satirique
et moqueur.
Ces deux mouvements d'idées ont pu se concrétiser chez
nous dans « lou
carri » et en fixer la date.
***
Mais qu'est-ce donc que « lou carri » ou le
char ?
Malgré le fait que cette manifestation honore sa seigneurie
« Messire
de Saint-Andiol », c'est une revanche satirique et impitoyable du
peuple mazanais sur les statuts imposés par ses dirigeants.
On y voit sa seigneurie juchée sur un char traîné
par 15 bourriques et
flanquée de ses co-seigneurs chamarrés, l'un d'escargots,
l'autre de
hannetons, deux calamités dont souffre l'agriculture locale - le
phylloxéra n'étant pas encore arrivé à
Mazan.
Ces premiers « carri » n'étaient qu 'un
défilé de chars rustiques
traînés par les chevaux des paysans, leurs mulets et leurs
ânes
flanqués de cavaliers. Le défilé, annoncé
par les cris, les roulements
des tambours et les grincements de crécelle,
faisait le tour du bourg suivi par toute la population. On profitait de
l'occasion pour annoncer sur la place publique les griefs du moment.
Les véritables seigneurs et les consuls apprenaient ainsi par la
voix
des personnes qui les pastichaient ce que tout un chacun pensait de
leur gestion. C'était une mascarade, mais l'ironie est une arme
redoutable surtout quand elle se manifeste devant une foule qui a bien
bu et bien festoyé et dont les sujets de mécontentement
sont bien
réels. Sorte de soupape de sûreté, le carri se
déroulait ainsi,
peut-être quelquefois brutal en paroles, mais surtout, le plus
souvent,
irrévérencieux. Au fur et à mesure que les ans
passaient, les seigneurs
abandonnaient quelques prérogatives dont les consuls
s'emparaient
souvent sans que le peuple n'en bénéficie. D'ailleurs,
malgré les
manifestations du carri, le Conseil des chefs de famille ne fut
réuni
que fort rarement avant que n'éclatât la
grande révolution française.. Mazan répondit alors
favorablement aux
insurrections parisiennes et dès le 22 avril 1789, il obtint de
son
Conseil la réduction de moitié du capage, impôt par
tête. Le 26 août,
il rédigeait son cahier de doléances. En 1790, la ville
manque de blé
et s'insurge et le 16 janvier 1791, à l'image de Carpentras,
Mazan
arbore les armes de France.
Modification du Carri
Puisqu'il n'y a plus de
seigneur, le carri devient sans objet. Pourtant, Mazan ne veut pas
abandonner cette manifestation qui a fait tant pour la gloire de la
cité et qui représente aux yeux conservateurs des
mazanais les fastes
des anciens régimes.
Les prochains « carri » vont donc changer d'esprit et
devenir des
rétrospectives historiques dont on respectera immuablement le
style de
génération en génération.
Comme on veut, chaque fois, que la manifestation surpasse les
précédentes, l'organisation en devient si importante et
si onéreuse que
le « carri » n'a plus lieu que tous les quatre ans, puis
tous les vingt
ans afin que chaque génération fasse mieux que ses
pères.
On soignera le choix des costumes qui variera selon les
possibilités du
moment, ce qui n'a d'ailleurs que peu d'importance puisque c'est un
tableau d'histoire que l'on veut présenter. Ce tableau peut
varier dans
le temps entre 1725 et 1791. On veillera au choix des montures et
à
leur présentation. Il faudra également étoffer le
cortège si bien qu
'on arrivera en 1980 et 1981 à utiliser une cavalerie de 100
chevaux
avec près de 200 figurants.
Histoire possible du premier Carri
Ce premier carri, comment est-il né ? Ce fut un banal
événement, au
soir d'un beau dimanche de mai, un simple fait divers qui ne
déchaîna
pas la chronique historique du Comtat.
Au document connu ne le relate. Nous voilà donc contraints de
laisser
quelque peu errer notre imagination et de broder autour des faits
historiques.
Les élections plus ou moins factices des consuls viennent de se
dérouler et, comme chaque année, elle ont donné
lieu aux agapes
habituelles.
Consuls, viguier, bourgeois et gros propriétaires amis des
consuls ont
festoyé à qui mieux mieux. Bien entendu, ce serait leur
droit s'ils
avaient soin d'en régler les frais en puisant dans leurs bourses
personnelles, mais c'est la communauté qui supporte la
dépense.
Or le peuple est à peine remis d'une très funeste
période. En 1709, ce
fut le terrible hiver, le plus froid de la période historique.
Tout a
gelé. Les arbres ont éclaté et beaucoup ont
péri. Il a fallu refaire
l'environnement, Mazan a connu une famine telle que le consul d'alors
qui était déjà le sire de Saint-Andiol a du faire
preuve d'humilité et
implorer d'ailleurs sans succès, le terrible vice-légat
d'alors :
Monseigneur Doria, afin de tenter d'obtenir un peu de blé que
Rome a
envoyé en Avignon.
En 1721, alors que Mazan avait quelque peu pansé ses blessures,
ce fut
la peste. « Ils ne mourrait pas tous », comme dit le
poète, mais tous
en souffrait terriblement.
En 1725, à Mazan, chacun a encore en mémoire la
pénible déclaration
faite l'an précédent par ce pauvre tailleur juif qui a
certifié, devant
le tribunal, ne se nourrir qu e de pain noir et d'oignon et ne boire
que de l'eau (manuscrit 1413 de la Bibliothèque de Carpentras).
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